Décès du père Jean-Marie Petitclerc par noyade
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<< Semaine du 17 au 23 novembre 2025 >>
Décès du père Jean-Marie Petitclerc par noyade
L'hypothèse d'un suicide provoque de très nombreuses réactions sur Internet.
- https://www.la-croix.com/religion/mort-du-pere-jean-marie-petitclerc-son-corps-retrouve-sur-une-plage-20251117
- https://www.leparisien.fr/val-d-oise-95/educateur-devoue-ou-pretre-voyeuriste-qui-etait-jean-marie-petitclerc-figure-du-milieu-educatif-a-argenteuil-21-11-2025-63HGRF4DG5HWDNPOPI5QLGGMW4.php
- https://www.don-bosco.net/actualites/a-dieu-jean-marie-petitclerc/
- https://www.facebook.com/580101872/posts/10164208545521873/
- https://cdn.bravemovement.org/files/FrenchVersionEUReport.pdf
Les faits
Le prêtre et éducateur Jean-Marie Petitclerc est mort ce lundi 17 novembre à l'âge de 72 ans, des suites d'une noyade, dans des circonstances qui restent à éclaircir. « C'est avec une immense tristesse et un profond désarroi que nous avons appris le décès de notre frère Jean-Marie Petitclerc ce matin. Après noyade, son corps a été retrouvé sur la plage, au bord de la mer en Normandie, où il avait passé ce week-end chez des amis », a fait savoir dans un communiqué les responsables de la province France-Belgique Sud des salésiens de Don Bosco.
Le week-end précédant sa mort, Jean-Marie Petitclerc devait se trouver avec ses frères salésiens à Nice, pour fêter les 150 ans de l'arrivée de la congrégation dans la ville des Alpes-Maritimes. Mais il avait renoncé à sa venue, « abattu par la déferlante » qui avait suivi la publication du jugement dont il avait l'objet quelques semaines plus tôt, précise le père Xavier Ernst, provincial pour la France et la Belgique Sud.
— La Croix
À l'origine du procès, un adolescent épaulé par sa mère qui accuse Jean-Marie Petitclerc de l'avoir agressé sexuellement, comme le rapporte le Journal de la Haute-Marne. Engagé sur les questions de décrochage scolaire, le religieux avait pris sous son aile l'adolescent atteint de phobie scolaire.
En 2023, lors d'un trajet en voiture, le prêtre salésien aurait imposé des « caresses » sur le genou gauche et le sexe du garçon, 13 ans au moment des faits. Des accusations que le concerné conteste fermement. Il reconnaît par contre être entré dans la salle de bains du plaignant lorsque ce dernier prenait sa douche. Un problème d'eau chaude à régler, selon lui. « J'ai peut-être entraperçu son dos ou ses fesses », avait-il soufflé lors du procès.
Plus tard dans la soirée et une fois couché, l'adolescent aurait à nouveau subi des attouchements de la part de l'éducateur. « Oui, il m'est arrivé de lui tapoter la cuisse comme j'aurais pu lui tapoter le dos », s'était-il défendu tout en assurant être quelqu'un de « tactile ».
Ce n'était pas la première fois que Jean-Marie Petitclerc se retrouvait face à la justice. Il avait été visé en 1999 et en 2014 par des plaintes pour agressions sexuelles qui s'étaient toutes deux soldées par un non-lieu. Un passé rappelé lors du dernier procès.
« Trois procédures sur 12 000 gamins, ça va, avait alors assuré le prévenu aux enquêteurs. Je travaille avec des ados, la suspicion, ça fait partie du métier. »
Message de la famille salésienne de Don Bosco
A-Dieu Père Jean-Marie Petitclerc
C'est avec une immense tristesse et un profond désarroi que nous avons appris le décès de notre frère Jean-Marie Petitclerc ce matin. Après noyade, son corps a été retrouvé sur la plage, au bord de la mer en Normandie, où il avait passé ce week-end chez des amis.
Nous sommes sans voix, tellement affectés par cette nouvelle brutale.
Nous pensons à sa famille, à tous ses proches, à tous les jeunes qu'il a accompagnés et à toute la famille salésienne de Don Bosco.Que le Seigneur accueille Jean-Marie dans sa dernière traversée…
Dans notre peine inconsolable, prions pour lui, pour vous tous, pour nous tous afin de rester ancrés dans l'Espérance ⚓🙏
De vives réactions sur Internet et sur les réseaux sociaux
Il est difficile de rendre compte de toutes les discussions qui ont eu lieu ces derniers jours. Voici deux contributions au positionnement antagonistes qui permettent de rendre compte du débat :
- Réaction du père Philippe de Kergorlay 🡵
- Réaction de Natalia Trouiller en réponse au père Philippe de Kergorlay 🡵
Réaction du père Philippe de Kergorlay, prêtre
Mort de prêtres.
La noyade du père Jean-Marie Petitclerc, éducateur remarquable, nous attriste tous. Et pose bien des questions. Il était, paraît-il, très affecté par l'accusation de « voyeurisme » et la suspension de ministère dont il avait fait l'objet. Il avait immédiatement fait appel d'une décision qui lui paraissait totalement infondée.
Il n'est pas le premier.
On compte en quelques années une bonne douzaine de suicides de prêtres, accusés à tort ou à raison. Du jamais vu.Depuis le rapport de la CIASE, les autorités ecclésiastiques ont décidé la tolérance 0. Tout prêtre accusé est immédiatement suspendu et son nom est publié dans les médias pour susciter d'autres plaintes éventuelles. Avant même les conclusions d'une enquête judiciaire, le prêtre est « grillé » dans l'opinion publique. Il ne retrouvera jamais sa place. Même s'il n'y a pas de poursuites, c'est terminé pour lui.
Le prêtre est l'homme de la miséricorde. Le pape François répétait aux confesseurs : « Pardonnez, pardonnez toujours. » Mais cela ne vaut sans doute pas pour les accusés de délits sexuels.
Dans ce cas, la miséricorde qu'il prêche s'efface devant la justice, et une justice plus impitoyable que la justice pénale civile. En Église, il n'y a ni prescription ni présomption d'innocence. On punit d'abord. Dieu fera peut-être miséricorde ensuite.
On pense à ce hadith où Muhammad fait d'abord lapider une femme adultère pour qu'ensuite elle puisse bénéficier de la miséricorde d'Allah. Quand il s'agit d'abus sexuels, nos autorités deviennent musulmanes.On se demande d'ailleurs pourquoi Jésus ne parle jamais en termes de coupables et de victimes, pourquoi il parle tant de miséricorde et si peu de justice, pourquoi il a choisi des apôtres au lourd passé comme le publicain ou le zélote, ou prêts à trahir comme Judas ou à renier comme Pierre. Jésus était bien naïf et ne connaissait pas les agressions sexuelles.
L'Education Nationale ou le ministère de la Jeunesse et des Sports font plus attention à leur personnel. Ils savent que les enseignants et les entraîneurs ont une tâche difficile et peuvent avoir des fragilités. Inutile de risquer une vague de suicides par une mise au pilori médiatique précoce. Les enquêtes sont plus discrètes mais non moins rigoureuses.
Les responsables ecclésiastiques viennent de changer, tant au niveau des évêques que des religieux. On peut espérer plus de délicatesse et plus d'attention aux problèmes vraiment contemporains. Les alertes de la CIVIISE sur les 160.000 enfants abusés chaque année en France, l'augmentation inquiétante d'agressions sexuelles commises par des mineurs ou la croissance exponentielle de la cyberpédocriminalité demandent la mobilisation de tous.
Et surtout l'éducation à l'amour vrai est une priorité où l'Église a toute sa place.
Père Philippe de Kergorlay, prêtre
Réaction de Natalia Trouiller
Dissonance cognitive.
Je vais encore me faire des copains, mais vu la viralité de ce post, je sors de la réserve que je m'étais imposée alors même que la thèse du suicide du père Petitclerc n'est pas prouvée et que ses frères ne l'ont pas mis en terre.
Et je rappelle ici quelques évidences, avant de proposer quelques pistes de réflexion.
Pour les évidences :
- Qu'un journal rapporte une décision de justice, ici une condamnation de six mois avec sursis pour voyeurisme, c'est son travail.
- Dans une démocratie, la justice est publique, sauf exceptions (protection des mineurs etc) Dans le cas qui nous occupe, le plaignant mineur au moment des faits n'a pas demandé le huis-clos. Le Journal de la Haute-Marne a fait une recension détaillée du procès que je mets en commentaire, cela remettra peut-être quelques idées en place.
- Se suicider n'est ni signe de culpabilité, ni signe d'innocence. Sinon Jeffrey Epstein ou le père Carricart seraient des martyrs.
- La justice et la miséricorde appartiennent à deux registres différents, et pour qu'il y ait miséricorde, il faut qu'il y ait justice.
- Oser dire que « En Église, il n'y a ni prescription, ni présomption d'innocence », c'est tout simplement faux. C1321 CIC/1983: « Quiconque est retenu innocent jusqu'à ce que le contraire ne soit prouvé. » Quant à la prescription, en droit canonique elle demeure la règle, même si elle peut être révoquée au cas par cas lorsqu'il s'agit de violences sexuelles sur mineurs. En revanche, il existe effectivement des « mesures conservatoires », et c'est heureux, qui permettent d'éviter que le potentiel agresseur ne continue d'être au contact de potentielles victimes. C'est l'équivalent dans notre droit français des « mesures préventives ». Personne ne s'en plaint quand il ne s'agit pas de prêtres.
- Par « prescription », j'imagine, Père, que vous voulez dire quelque chose comme « droit à l'oubli après des années de bonne conduite ». C'est méconnaître de façon abyssale la spécificité des crimes sexuels. Pour des raisons que les neurosciences ont mis au jour depuis plusieurs années déjà, on sait aujourd'hui que la moyenne des personnes agressées durant l'enfance et l'adolescence ne parle qu'à l'âge de 52 ans. (Source : Brave Movement) On peut très bien n'avoir aucune alerte pendant des décennies sur quelqu'un et tout à coup des dizaines de signalements. C'est ce qui se passe avec Betharram, par exemple.
- Oui, le père Petitclerc avait écrit des choses remarquables sur la pédagogie, et il s'occupait de gamins dont personne ne s'occupait. Raison de plus pour être d'autant plus respectueux et précautionneux avec eux. Tous ceux qui travaillent avec des populations difficiles savent que l'on doit être intraitable sur le RESPECT.
Je ne vais parler ici que de ce qui a été reconnu.
- Non, on n'entre pas dans la douche d'un enfant pour « un problème d'eau chaude ». D'autant que les problèmes d'eau chaude se règlent rarement au niveau de la douche.
- Non, on ne met pas ses mains sur les cuisses d'un enfant sous prétexte qu'on est « tactile ». Ces gamins si difficiles, même un éducateur stagiaire sait que le contact physique leur est souvent extrêmement compliqué. Et les cuisses ce n'est pas n'importe où.
- Le couplet sur Jésus choisissant des pécheurs est indécent. La pédocriminalité n'est pas d'abord un péché, c'est un crime. A ma connaissance, Jésus n'a pas choisi de criminel parmi les douze. Et certainement pas de criminel fuyant la justice. Arrêtez de confondre les deux plans. Et pour l'anecdote, dans ma concordance, il y a 12 fois justice et 11 fois miséricorde dans les 4 évangiles ; et si on prend le NT entier, le ratio passe à 91 pour 41. Oui, la justice importe à Jésus.
- Quant à « porter plus d'attention aux problèmes vraiment contemporains »… Je reprends in extenso votre formulation : « Les alertes de la Ciivise sur les 300.000 enfants abusés chaque année en France ». D'abord je me permets de rectifier: le chiffre est de 160.000 et non 300.000 (vous confondez avec les 330.000 de la CIASE sans doute), et c'est déjà épouvantable. Ensuite, ces 160.000 enfants sont victimes dans tous les cadres: familial, amical, clérical, autre. Ne croyez pas que la CIIVISE ne s'occupe que des victimes d'inceste. Si vous lisez son rapport, ou même vous intéressez à ce que son titre veut dire (Commission Indépendante sur l'inceste ET LES VIOLENCES SEXUELLES FAITES AUX ENFANTS) vous verrez que les enfants victimes de prêtres sont comptés dedans.
Oui, la cyberpédocriminalité est un problème endémique. Des responsables de séminaires me disent que c'est une préoccupation constante pour eux aussi. Dans les écoles catho comme ailleurs, les violences sexuelles entre mineurs explosent. Le dernier appel au secours reçu chez moi date de la semaine dernière. S'imaginer, pour toutes ces problématiques, que le « discours de l'Église » serait un paravent efficace à lui seul c'est se cacher derrière son petit doigt.
La vérité, c'est que nous avons à être humbles plus que les autres, parce que pas plus que les autres nous n'avons fait bien, en revanche plus que les autres nous avons donné des leçons de morale pendant que les victimes s'empilaient dans nos sacristies.
La vérité, c'est qu'une fois encore nous hagiographons un prêtre condamné en première instance au motif qu'il s'est probablement suicidé, comme si cela voulait dire quoi que ce soit.
La vérité, c'est que personne ne pleure les dizaines de victimes qui se suicident en silence. Que l'on pousse des cris d'orfraie sur l'euthanasie mais que personne ne parle de ces victimes qui achètent un billet pour la Suisse ou la Belgique après des années de torture.
La vérité, c'est que nous sommes en pleine dissonance cognitive.Soyons francs et disons le franchement : si l'on accepte de laisser tomber le principe de précaution pour protéger les enfants, combien d'enfants sommes-nous prêts à sacrifier pour être certains d'avoir la messe pas trop loin et tous les dimanches si possible ?
Parce que c'est de cela, et de rien d'autre, qu'il s'agit.
Informations complémentaires
Père Jean-Marie Petitclerc
- https://hanslucas.com/souzounoff/photo/82471
- https://www.cathobel.be/2025/11/les-salesiens-decident-dune-mesure-conservatoire-a-legard-du-p-jean-marie-petitclerc/
- https://x.com/ntrouiller/status/1984337326798225736
- https://www.la-croix.com/religion/mort-du-pere-jean-marie-petitclerc-son-corps-retrouve-sur-une-plage-20251117
- https://www.facebook.com/580101872/posts/10164208545521873/
Jean-Marie Petitclerc est prêtre salésien et éducateur spécialisé engagé de longue date auprès des jeunes.
- 1953 Naissance 🡵
- 1995 Il fonde l'association Valdocco au pied des tours d'Argenteuil 🡵
- 1999 Jean-Marie Petitclerc est visé par une première plainte pour agressions sexuelles. Les investigations aboutiront à un non-lieu 🡵
- 2007-2009 Chargé de mission au cabinet de Christine Boutin (ministre du Logement et de la Ville) et responsable de la coordination des acteurs locaux
- 2014 Jean-Marie Petitclerc est visé par une seconde plainte pour agressions sexuelles. Les investigations aboutiront à un non-lieu 🡵
- 2024 Une troisième plainte est déposée par un adolescent accompagné par sa mère contre Jean-Marie Petitclerc [Journal de la Haute-Marne, 17 octobre 2025, page 2]
- 2025
- 14 octobre : Jean-Marie Petitclerc est relaxé pour l'agression sexuelle, et condamné à six mois de prison avec sursis pour voyeurisme. Il fait appel 🡵
- Le père Jean-Marie Petitclerc a interdiction conservatoire de tout contact isolé avec des mineurs jusqu'à ce qu'une décision de justice définitive soit rendue 🡵
- 17 novembre : décès par noyade. Son décès met fin à l'action publique à son encontre 🡵. L'hypothèse d'un suicide provoque de très nombreuses réactions sur Internet (à l'instar du père Philippe de Kergorlay 🡵 et de Natalia Trouiller 🡵)
Salésiens de Don Bosco
A tout moment, vous pouvez écrire aux Salésiens pour être écouté(e).
Vous pouvez écrire à paroledevictimes@salesien.org.
Au niveau national
En France, les Salésiens de Don Bosco sont membres de la Conférence des religieux et religieuses de France (Corref). Vous pouvez aussi passer par la ligne nationale au 01 41 83 42 17 pour les victimes de violences et d'agressions sexuelles dans l'Église Catholique. De fait, les Salésiens de Don Bosco travaillent pleinement avec la Commission Reconnaissance et Réparation.
En Belgique, les Salésiens de Don Bosco sont membres de la Conférence des religieux et religieuses en Belgique (Coreb). Vous pouvez contacter l’Église en Belgique en cas d'abus dans une relation pastorale ou par téléphone au 02 507 05 93
Source : page « Cellule d'écoute » du site salesien.com
Voir aussi :