« Martyres de la chasteté » : survivre à son viol n'est pas « brader sa dignité »

Mária Magdolna Bódi, hongroise tuée par des soldats soviétiques en 1945 au cours d'une tentative de viol, a été béatifiée et érigée en « martyre de la chasteté » samedi 6 septembre. Mathieu Poupart, dénonce le sens actuel de ce concept dans l'Église, qui culpabilise les victimes survivantes 🡵.

Pour mieux saisir la thèse de Mathieu Poupart, vous pouvez lire sa tribune en libre accès sur le site Internet de La Croix.

Au XXe siècle, en même temps que l'Église cachait les agresseurs sexuels, elle a dissimulé l'idée même de violence sexuelle, jusque dans sa propre théologie. Après la libération sexuelle en Occident, elle a abouti à une pastorale parlant abondamment de sexualité, de concubinage ou de masturbation, mais incapable d'effort de pensée sur le viol et le consentement.

Même les martyres de la chasteté ne lui servent pas à réfléchir à la violence. Au centenaire de la mort de Maria Goretti, Jean-Paul II l'érigeait plutôt en contre-modèle face à notre époque où « on exalte souvent le plaisir, l'égoïsme ou même l'immoralité, au nom de faux idéaux de liberté et de bonheur ».

Qui donc exalte le plaisir et l'égoïsme des enfants victimes de viol ? Le média officiel Vatican News a titré la nouvelle de la béatification de samedi : « Mária Magdolna Bódi, le courage de ne pas brader sa dignité ». Les millions de femmes qui ont survécu à leurs viols par l'Armée rouge ont-elles bradé leur dignité ? Mária Magdolna Bódi elle-même, aurait-elle mérité le mépris si son agresseur l'avait violée plutôt que de décharger son arme ? Ce titre déplorable révèle le paradigme moral où s'embourbe la pastorale catholique depuis un demi-siècle, la dissolution du viol dans le libertinage.

La Croix