Bon-Pasteur à Metz : "on pleurait en silence"
Au fil de la discussion, les souvenirs douloureux font pourtant rapidement surface. Toutes se souviennent les premières semaines passées en observation avant de traverser le long tunnel de la rue du Tombois pour accéder au grand bâtiment où elles allaient p asser plusieurs années, sans aucun contact avec leurs familles : « La sœur m'a montré mon dortoir. Elle a fermé la fenêtre à barreaux et a retiré l'espagnolette puis a fermé la porte à clé. Pour aller aux toilettes ? Il y avait un seau hygiénique. »
Le jour de son arrivée, Sylvie a tenté de fuir : « On m'a rattrapée très vite. En représailles, au lieu d'aller en classe, on m'a envoyée à l'atelier paille de fer. » Francine également tentera de fuguer avec deux amies : « Les gendarmes sont venus nous récupérer à Sarreguemines. J'ai passé trois semaines à l'isolement, nourrie d'épinards. » Il ne fallait pas se plaindre : « On pleurait en silence. »
Elles se souviennent également de cette soirée où l'une de leurs camarades s'est immolée par le feu pendant une séance de cinéma. « Elle s'appelait Marie-Antoinette. Elle avait mangé à ma table ce soir-là. Je me rappelle encore des lambeaux de sa chemise de nuit collés à sa peau », raconte Francine. « J'ai vu une boule de feu descendre l'escalier en hurlant qu'elle ne voulait pas mourir », se souvient Sylvie qui a assisté à la même scène. La jeune femme est décédée quatre jours plus tard à l'hôpital : « Je n'en ai plus dormi pendant des nuits. »