Père Yves Grosjean : les décisions de Mgr Antoine Hérouard en question

L'affaire Grosjean illustre une ligne de crête difficile à trouver et plusieurs angles morts dans la gestion des violences sexuelles par l'Église catholique. Face à une première plainte classée en 2016 pour prescription, l'Église autorise l'éloignement géographique sans véritable prise en charge. Le père Grosjean est ensuite envoyé au Maroc où il exerce des responsabilités auprès de jeunes, notamment comme aumônier scout.

À son retour en France, son évêque, informé d'une plainte classée en 2016 et de comportements « non ajustés » au Maroc, le nomme en paroisse, sous la seule surveillance d'un curé, qui entretient avec le père Grosjean une amitié ancienne. Si l'archevêque de Dijon se défend de tout manquement et défend des décisions « efficaces » et « proportionnées » à la situation, une question demeure : comment redonner confiance aux catholiques qui doutent de la capacité de leurs autorités diocésaines à leur assurer que les prêtres qu'ils fréquentent ne font l'objet d'aucun soupçon ?

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Le secret des mesures conservatoires

Comment s'assurer de l'effectivité réelle des restrictions de ministère quand elles restent presque totalement secrètes ? Celles visant le père Grosjean n'étaient connues, sur le terrain, que de son curé, le père Paul Royer. Seul ce dernier, ami de trente ans du prêtre accusé, était en pratique chargé de veiller à leur application.

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Avec le secret des mesures conservatoires, le père Yves Grosjean n'aurait pas respecté ses restrictions de ministère 🡵.

La présomption d'innocence vue par Mgr Hérouard

En apprenant l'existence de ces mesures préventives gardées ultra-confidentielles, des familles du diocèse contactées par La Croix évoquent un sentiment de « trahison », alors qu'elles ont été exposées, à leur insu, à un prêtre soupçonné d'agression sexuelle sur mineur. A contrario, pour l'archevêque de Dijon, rendre publiques ces sanctions serait revenu à « bafouer la présomption d'innocence du prêtre » et à le condamner à « une mort sociale, sans preuve ».

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Mgr Antoine Hérouard n'a pas contesté le placement en détention provisoire du père Yves Grosjean, intervenu suite à sa mis en examen 🡵… donc avant son procès. Il semble donc que cela ne viole pas pour lui la présomption d'innocence.

La distinction opérée par l'archevêque entre « enfants » et « adolescents »

Mgr Antoine Hérouard a laissé le père Grosjean intervenir en école primaire. Il s'en explique en ces mots : « Je savais qu'il avait eu auparavant des relations non ajustées avec des jeunes, donc je ne l'aurais pas nommé aumônier : je savais qu'il y avait un souci. Mais Saint-Pierre est une école primaire : le problème des relations ne s'est posé qu'avec des adolescents ».

La distinction opérée par l'archevêque entre « enfants » et « adolescents », qui « révèle une méconnaissance préoccupante des profils d'agresseurs sexuels, qui peuvent adapter leurs comportements aux opportunités », souligne l'avocate [Nadia Debbache].

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La candeur bienveillante de Mgr Hérouard dans le discernement

Mgr Hérouard dresse le portrait d'un prêtre « sincère », qui « n'aurait pas cherché à contourner les obstacles » 🡵.

Or :

  • Le père Yves Grosjean n'aurait pas respecté ses restrictions de ministère 🡵.
  • Le père Yves Grosjean qui reconnaît : « J'avais mon fonctionnement, parfois pervers malheureusement » 🡵.
  • Le père Yves Grosjean était rentré en France à la demande de l'archevêque de Rabat « afin de pouvoir bénéficier d'un suivi psychologique » 🡵 🡵.
  • En 2016, il avait déjà fait l'objet d'une plainte « pour agression sexuelle », classée sans suite pour prescription 🡵.

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