Fondacio : des abus sexuels cachés pendant 50 ans

Six évêques informés des abus du fondateur

Selon un document interne « confidentiel », daté du 22 août 1991 à l'attention des responsables et que L'Express a pu consulter, six évêques ont à l'époque été informés de la situation, dont un à Rome. « À Nice, Mgr Saint-Macary nous a fait savoir qu'il ne voulait pas s'en occuper. À Rome, ils nous ont dit de se débrouiller avec les évêques Français. Mgr Thomas, évêque de Versailles, a été le seul à nous soutenir. Le but était de sauver la communauté », résume Gérard Testard. Selon le document d'août 1991, la gravité des faits est pourtant claire : les responsables des FMN ont eu « connaissance d'une dizaine de personnes au minimum impliquées dans ces relations », toutes appartenant aux FMN, pour des faits ayant eu lieu dès 1974. Il est également fait mention de « deux cas » de personnes « ayant prolongé le vécu de Jean-Michel », selon le vocabulaire euphémisé de l'époque, « dont [nous savons] qu'aujourd'hui ils sont arrêtés ». Interrogé sur le sujet de potentiels autres agresseurs, Gérard Testard assure l'avoir « appris plus tard, quand les langues ont commencé à se délier ».

L'express

Soupçons dans l'église orthodoxe

Jean-Michel Rousseau, lui, a continué sa carrière dans l'orthodoxie - au point de devenir archiprêtre en 2017, un rang honorifique juste en dessous de celui d'évêque. Selon Gérard Testard, l'Église orthodoxe russe ne s'est jamais rapprochée de Fondacio, dans les années 1990-2000, pour récolter d'éventuelles informations sur cette nouvelle « recrue ». Mais en juin 2014, l'associatif aurait été contacté par « une jeune dame de la paroisse orthodoxe de Jean-Michel », qui exerce alors à Vanves, en région parisienne, nous dit-il. « Accompagnée d'un prêtre orthodoxe russe, elle a pris plusieurs fois contact avec moi pour évoquer des problèmes d'emprise qu'elle vivait avec lui », garantit-il. Contacté, ce prêtre orthodoxe nie les faits, et assure « n'avoir jamais connu Mr Rousseau ».

En octobre 2023, le Collectif Choisir la Lumière a également tenté d'avertir l'église orthodoxe russe, en rencontrant Mgr Sirotenko pour lui remettre en main propre un dossier fourni. Le document contient des informations sur les abus sexuels reprochés à Jean-Michel Rousseau au sein des FMN, ceux qu'il aurait commis sur sa petite sœur Marylène, et sur la fameuse visite d'une paroissienne de Vanves se plaignant de comportements de Jean-Michel Rousseau à un ancien responsable de Fondacio. « Mgr Sirotenko nous a confirmé qu'il savait qu'une paroissienne orthodoxe s'était plainte, mais il estimait que l'affaire était confuse », certifie un membre du collectif.

La tenue d'une « enquête interne » est alors promise par le responsable orthodoxe, et le collectif ne reçoit plus d'autres nouvelles jusqu'en mars 2025, date à laquelle certains de ses membres découvrent le fameux hommage au « père Michaël pour ses 80 ans », signée de Mgr Sirotenko, et lui font part de leur étonnement. « Il nous a alors répondu que Jean-Michel Rousseau était parti à la retraite en septembre 2024 et n'exerçait plus aucune responsabilité au sein du diocèse », rapporte le collectif.

Fondacio indique avoir pris contact avec la hiérarchie orthodoxe le 2 février 2021, quand François Prouteau écrit directement à Mgr Antoine Sevyruk, patron de l'orthodoxie russe en France et prédécesseur de Mgr Sirotenko. Dans ce courrier, que L'Express a pu consulter, il l'informe clairement des abus sexuels dont est soupçonné Jean-Michel Rousseau. « On m'a confirmé la réception de mon courrier, mais je n'ai pas eu de nouvelles depuis, malgré plusieurs relances », résume l'ancien directeur.

L'express

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