Religieuses abusées : quelles structures sociologiques rendent ces abus possibles ?
La question des abus sur les moniales catholiques n'est apparue que récemment dans l'espace public contrairement aux abus sur des enfants ou femmes adultes laïques. Or, ces dernières années de plus en plus de cas d'abus de pouvoir, spirituels ou sexuels perpétrés dans des communautés féminines arrivent au jour. Mais comment sont-ils possibles ? Cet article vise à interroger des dispositifs structurels des communautés monastiques féminines, y compris dans leurs relations de genre avec les prêtres ou communautés d'hommes qui rendent ces abus possibles. Replaçant le sujet dans le contexte particulier de vie monastique régie par une discipline ascétique, apparaît la question de savoir à partir de quel moment une pratique ascétique peut devenir abusive. Après avoir étudié cinq types de structures identifiés comme permettant l'apparition d'abus, j'y replace la religieuse individuelle abordée sous trois niveaux : intellectuel, spirituel et corporel. Si aucune des structures en soi et des rapports des individus aux structures ne produit directement d'abus, la conjonction de ces différents éléments les rendent possibles. S'appuyant sur des enquêtes de terrain menées dans des communautés monastiques catholiques en Europe et en Afrique entre 2004 et 2021, ainsi que des entretiens avec des sœurs sortantes menés entre 2020 et 2024, cet article propose une approche empirique du sujet qui est encore peu existante.