Haffreingue à Boulogne-sur-Mer : violences et d'agressions sexuelles entre 1960 et les années 1990

À Boulogne-sur-Mer, des anciens élèves du groupe scolaire catholique Haffreingue brisent le silence sur les violences qu'ils disent avoir subies dans l'établissement dans les années 70. La médiatisation d'affaires comme Riaumont ou Bétharram les ont poussés à partager leur histoire, déclenchant une vague de récits similaires 🡵.

Des témoignages

Tout est parti d’un message publié le 10 mars dernier sur le groupe Facebook Amis de Lycée Haffreingue- Chanlaire : « Quand donc l'institution Haffreingue entamera-t-elle à son tour le travail, indispensable qu'elle doit aux anciens, d'oser reconnaître les agissements de certains professeurs dans les années 70 et 80 ? Oui, il y a eu des gestes plus qu'équivoques, des humiliations, des violences psychologiques et parfois physiques. Et même si certains sont morts sans avoir eu à rendre compte, d'autres sont, je crois, encore en vie et doivent reconnaître leurs agissements et, surtout, demander pardon à ceux qu'ils ont ainsi maltraités » 🡵. Les commentaires font remonter de nombreux témoignages… et une médiatisation débute.

Bertrand, un Boulonnais d'une petite cinquantaine d'années, a souffert dans sa chair des « règles » de discipline du « Petit Haffreingue ». « Un enseignant m'a pété les phalanges des doigts, j'étais en sang, on ne peut pas oublier ça. » Pas plus qu'il n'a oublié les casiers en bois dont le volet se referme sur les mains, volontairement. Bertrand ouvre une parenthèse sur le choix des élèves ciblés par les violences. « Les enfants de la bourgeoisie boulonnaise n'étaient pas inquiétés, les violences visaient plutôt les élèves issus de familles d'ouvriers, ou de la classe moyenne. (…) Il y avait une sorte d'entre-soi entre les familles très catholiques, pour ne pas dire ultra-catholiques, et certains enseignants. »

La voix du Nord

Franck Boisgontier : « J'ai eu des anciens élèves qui m'ont raconté avoir été témoin ou avoir subi des violences physiques, psychologiques, sexuelles.

Ce sont des témoignages qui sont très violents : des attouchements, des fessées… J'avais vu que des comportements violents de la part d'un surveillant et de certains professeurs, notamment des prêtres, qui aimaient bien mettre des fessées en public aux enfants qui parlaient dans les rangs, ou qui avaient de mauvaises notes. C'étaient des violences, des humiliations… »

François Rouet : « Il y avait un pion qui avait les cheveux très gominés. Lui, son malin plaisir, c'était de prendre les garçons sur ses genoux, sa main avait tendance à glisser à droite à gauche. Heureusement, je n'ai eu à souffrir de violences sexuelles, moi c'était uniquement des violences mentales et physiques.

Quand j'ai quitté le lycée - on m'a plus ou moins demandé de partir parce que les résultats scolaires n'étaient pas très bons - et bien j'ai explosé. J'ai commencé à me couper les bras, j'ai encore des marques. Tentative de suicide, la drogue et après je suis parti en vrille, j'ai eu les cheveux verts et la boucle d'oreille. Je pensais que j'étais le seul amoché, mais je me rends compte avec tous les témoignages sur les réseaux sociaux que je n'étais pas le seul. »

France 3 Hauts-de-France

Si la majorité du corps enseignant à l'époque de la présence des prêtres n'a pas fait de vagues, il en ressort aujourd'hui une poignée de noms connus de tous. Lesquels ont visiblement traumatisé des générations. À la suite de la publication de notre premier article sur Haffreingue, une demi-douzaine de témoignages supplémentaires sont venus compléter cette ambiance singulière.

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Mais aussi cet abbé à la fois respecté par certains, craint par une autre frange pour son « sadisme » et surnommé « Quasi » pour Quasimodo. « Il était la terreur du collège jusqu'à sa retraite. Il hurlait sur des gamins, les insultait en public », éclaire Jérôme. Ou cet autre prêtre « muté en Algérie ou au Maroc en 1968 , rappelle Laurent. Il avait fait des choses sexuelles. Le supérieur d'Haffreingue gérait ça avec l'aval de l'évêché et du jour au lendemain il est parti. Un prof qui disparaît comme ça, c'est louche ».

La voix du Nord

La réaction du coordinateur de l'ensemble scolaire Notre-Dame de Boulogne

Aujourd'hui, l'ensemble scolaire Notre-Dame de Boulogne est un groupe scolaire composé de cinq unités pédagogiques d'enseignement privé et catholique :

  • l'École Notre-Dame,
  • le Collège Haffreingue (sous tutelle Diocésaine),
  • le Collège Nazareth (sous tutelle Lasallienne),
  • le Lycée Nazareth-Haffreingue
  • la Prépa Nazareth-Haffreingue.

Laurent Brunelle, l'actuel directeur de l'établissement [Directeur du Lycée et coordinateur du groupe scolaire, pour être exact 🡵], a écrit ce mercredi aux parents des élèves dont il a la responsabilité. « Aucune violence n'a de valeur pédagogique et éducative », pose le directeur. « Aussi, nous ne pouvons que condamner vivement de tels agissements et inviter les anciens élèves qui en auraient été victimes à libérer la parole. » Laurent Brunelle poursuit : « Il est incompréhensible que les agissements de quelques-uns viennent mettre une ombre – et plus qu'une ombre- sur des laïcs et des religieux qui ont donné leur vie pour l'institution. Mais (…) je pense avant tout aux victimes et leur renouvelle ma compassion. »

La voix du Nord

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