Abbé Pierre : le Vatican était au courant de ses agressions sexuelles sur des femmes dès 1955

« Dès l'automne 1955, non seulement le haut clergé français connaissait la face noire et la dangerosité de l'abbé Pierre mais le Saint-Siège aussi », affirment dans « L'Abbé Pierre, la fabrique d'un saint » (Allary Éditions) les journalistes Marie-France Etchegoin et Laetitia Cherel 🡵.

Dans un livre publié jeudi 17 avril, les journalistes de Radio France Laetitia Cherel et Marie-France Etchegoin (1) décortiquent l'irrésistible ascension en France du célèbre prêtre, s'appuyant sur une personnalité « extrêmement clivée » et l'inaction d'une hiérarchie pourtant au fait de ses agissements envers les femmes depuis les années 1950.

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Le Vatican avait bel et bien exigé, dès 1955, une procédure canonique auprès de l'évêque de Versailles, Mgr Alexandre Renard. Et ce sont certains membres de l'épiscopat français qui ont protégé Henri Grouès, par peur du scandale et face à l'influence de ce dernier.

Les journalistes de Radio France ont déniché la réponse de Mgr Renard : « Il semble que ses relations « inhonestae » [déshonorantes] ont été moins graves qu'il n'a été dit : [l'abbé Pierre] a eu des gestes d'attendrissement en des moments d'épuisement nerveux compliqués de détresse, lors de grandes conférences en Amérique et en France, et les attitudes visées n'ont jamais existé en présence d'autres personnes ». L'évêque neutralise ainsi toute tentative vaticane d'enquête canonique quand bien même des alertes lui ont été remontées. Deux ans plus tard, une monition canonique du Vatican sera infligée au prêtre, qui évitera par la suite toutes les tentatives d'encadrement de l'épiscopat.

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Le livre décrit encore un homme gérant Emmaüs comme sa propre entreprise, recevant les donations sur son compte bancaire personnel et utilisant parfois l'argent à son propre bénéfice, en allouant même de « gros budgets de Minitel Rose ».

(1) « Abbé Pierre : La Fabrique d'un saint », Laetitia Cherel et Marie-France Etchgoin, Allary Éditions, 416 p., 2025

La Croix

Réaction de la CEF

Réaction de la Conférence des évêques de France suite aux nouvelles révélations sur l'abbé Pierre

La CEF salue le travail d'enquête des journalistes. C'est précisément pour permettre de faire toute la vérité possible qu'elle a ouvert les archives nationales de l'Église (CNAEF) dès septembre 2024 et demandé au Saint-Siège d'enquêter dans les siennes.

Les éléments mis au jour sont graves. Ils méritent d'être creusés, pour comprendre ce qui s'est passé et quel a été le comportement des évêques français qui étaient en responsabilité au sein de l'ancienne ACA (Assemblée des cardinaux et des archevêques, ancêtre de la CEF), dans les années 1950. Il y aura à comprendre aussi comment tout cela a pu être oublié, et disparaître potentiellement des archives du CNAEF à partir de 1970.

Il semblerait opportun que la Commission d'enquête historique mise en place par Emmaüs puisse se saisir de ces éléments.

La CEF quant à elle, au regard de la gravité des faits évoqués, va se rapprocher de la Nonciature et du Vatican pour faire la lumière sur ces éléments dont elle n'avait pas connaissance.

CEF

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