Notre-Dame de Bétharram : un établissement géré en vase clos

Première surprise : tous les prêtres directeurs de Bétharram en poste entre 1961 et 1993 sont aujourd'hui mis en cause devant la justice. Parmi les quatorze prêtres ciblés à travers les 200 plaintes, six étaient des membres clés de l'Ogec. Deux autres administrateurs apparaissent dans plusieurs témoignages, mais sans être pour l'heure versés dans le dossier judiciaire.

Quatre prêtres se sont notamment partagé trente ans durant les fonctions de chefs d'établissement et de président de l'Ogec de Bétharram, quand ils ne les cumulaient pas. En 1988, le père Pierre Silviet-Carricart, dont le nom revient aujourd'hui dans 24 plaintes pour agressions physiques, sexuelles et viols, était à la fois président de l'Ogec et directeur de Bétharram. Pendant les trois ans où il a cumulé ces fonctions, il était donc son propre employeur : une pratique en dehors de tous les clous, comme le rappelle Bruno Poucet, professeur émérite en histoire de l'éducation : « Le chef de l'établissement est invité au conseil d'administration, mais ne peut pas voter ou faire partie du bureau, comme président. Sinon, il serait juge et partie, par exemple sur les hausses de salaire ou les promotions. » A Bétharram, cette situation anormale n'a provoqué aucune réaction. Avant Silviet-Carricart, le précédent chef d'établissement, Beñat S. – visé lui par 12 plaintes – fut lui aussi son propre employeur entre 1981 et 1986.

Autre bizarrerie : pendant dix ans, le comptable de Bétharram, Robert D., siégeait au bureau exécutif de l'Ogec, notamment comme trésorier. Comment pouvait-il avoir la distance nécessaire à l'exercice de ses fonctions ? Au fil des procès-verbaux, les mêmes signatures reviennent : le père Joseph R., visé par des plaintes pour attouchement sexuel, enseignant à Bétharram et administrateur de l'Ogec pendant trente ans. Quant à Paul F., lui aussi sur la liste de la gendarmerie, ce prof de latin détient le record de longévité, comme pilier de l'Ogec de 1971 à 2008. A 85 ans, deux ans avant sa mort, il signait toujours les procès-verbaux de l'association.

Libération

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