Violences sexuelles et enseignement catholique

Je vois passer des tweets dans ma timeline, il paraîtrait que l’enseignement catholique serait un totem d’immunité contre les violences sexuelles.

AH. Petite anecdote perso.

Une amie très catho, communautaire de l’Emmanuel, prof en lycée catho, m’a dit il y a quelques années ceci : « Tu sais, catho ou pas, ça change rien. Je peux te donner les tarifs des p*pes dans tous les établissements de la région, privés ou publics… »

Ça m’avait tuée.

Et puis les enfants ont grandi.
Ils ont ramené des amis à la maison.
On a compté hier soir, avec mon mari.
Sur les sept signalements qu’on a faits/aidé à faire en 13 ans, 6 étaient dans des familles très cathos.
Où la foi était brandie comme un totem d’immunité.

De mon côté j’ai commencé à écouter les personnes victimes de violences sexuelles dans l’église.

Il faut arrêter de s’imaginer que les prêtres prédateurs s’en prennent à leurs victimes par hasard.
Ils choisissent des victimes qui ont souvent DÉJÀ subi des violences sexuelles. Tout simplement parce qu’un gosse qui vit déjà ces choses-là à la maison, à qui son incesteur dit que c’est normal, est pré-formaté pour le croire dans la bouche d’un prêtre.
Autre cas de figure, les adultes cathos agressés enfants que des prêtres prédateurs réactivent.
Bah oui, des traumas d’enfance pas soignés, ça crée des mécanismes de répétition, et les prédateurs sont extrêmement doués pour ça.

Souvent, la confession est utilisée pour savoir s’il y a eu violences sexuelles.
Ensuite on prétexte qu’on va « t’aider à guérir ».
On pose les mains sur les parties « souffrantes ». Et hop c’est parti. J’ai vu ça des dizaines et des dizaines de fois.

Ce qui fait, j’ai vu ça plein de fois aussi, que certains évêques / supérieurs majeurs / responsables disent de ces victimes: « baaaaa franchement elles cherchent »
Non, elles cherchent pas. En revanche les prédateurs, eux, les cherchent. Ils les kiffent. Imaginez: un enfant dont on est sûr qu’il ne parlera jamais parce qu’il a appris à la maison que les violences sexuelles c’est normal ! Un adulte déjà traumatisé qui va s’enfoncer dans son trauma !
LE RÊVE

Et puis. Le nombre de victimes qui n’arrivent pas à corréler ce qu’elles vivent avec les mots « violences sexuelles », mais vous n’avez pas idée.
Même quand les parents ont tout bien expliqué sur le corps sanctuarisé etc.

Je passe mes journées avec des gens généralement plus futés que la moyenne qui me décrivent les horreurs subies, et ça ne rate jamais: quand je leur dis « c’est très grave », en face j’ai un flottement puis:

On ne raccorde pas théorie et pratique.
Tout simplement parce que ce qu’on s’imagine des violences sexuelles quand nos parents nous en parlent est extrêmement éloigné de la réalité de ce qu’on vit.
Très souvent, beaucoup de « douceur » dans la prédation.
Cette sensation d’être à côté de son corps.
Cette culpabilité énorme. Ça, c’est bien le signe qu’on est coupable, que c’est pas l’agresseur le méchant non ?
Et puis j’y suis retourné. On ne retourne pas se faire violer, donc c’est pas un viol. Etc etc.

Tant de raisons qui font qu’on ne parle jamais.
Parce que quand on est sous emprise, on n’est pas juste sous l’influence d’une personne.
On est pris dans un système complexe d’alliances et de fidélités.
On a des parents géniaux, mais comment leur parler de ce que fait l’abbé X qu’ils aiment tant ?
C’est beaucoup trop dur.

Et pour moi, l’avantage de ces séances d’éducation sexuelle, c’est que ça introduit un tiers formé dans le système.
D’ailleurs ça ne loupe jamais.
A chaque intervention, des gamins viennent parler en privé aux intervenants.
Bénissez le Ciel de ça.
Ça sauve des vies.