Les Chevaliers de Colomb recouvrent des mosaïques de Rupnik
« Notre première préoccupation doit être les victimes d’abus sexuels, qui ont déjà énormément souffert et qui risquent d’être encore plus blessées par l’exposition permanente des mosaïques au Sanctuaire », a déclaré Patrick Kelly, le chevalier suprême de l’organisation caritative catholique, précisant que cette décision était le fruit d’un « processus approfondi ».
— La Croix
Informations complémentaires
Père Marko Rupnik
Chronologie
- 2018-2020 : Première enquête canonique Suite à la dénonciation d’une victime en 2018, Rupnik est excommunié pour « absolution du complice » (il avait donné l’absolution à une femme qu’il avait agressée lors d’une confession en 2015). L’excommunication est de courte durée puisqu’elle est levée un mois plus tard 🡵 par un décret du DDF en mai 2020 🡵. Mais à ce stade, rien n’a filtré ! Le secret des procédures ecclésiastiques a bien fonctionné 🡵.
- 2021-2022 : Deuxième enquête canonique Des accusations relevant d’agressions sexuelles proviennent d’une vingtaine de religieuses et anciennes religieuses 🡵. À la demande de la Congrégation pour la Doctrine de la foi (CDF), la Compagnie de Jésus diligente une enquête et remet ses conclusions. Cependant les faits sont prescrits. Malgré la tentative des jésuites pour lever la prescription, en octobre 2022 le Dicastère pour la Doctrine de la Foi (ex-CDF) clôt le dossier, empêchant l’ouverture d’un procès canonique.
- Décembre 2022-février 2023 : Enquête interne des jésuites Les témoignages d’une quinzaine de nouvelles victimes, établissant alors que : « Les comportements rapportés du père Rupnik ont eu lieu à diverses périodes entre le milieu des années 1980 jusqu’en 2018. Ils couvrent une période de plus de 30 ans. Beaucoup de ces personnes ne se connaissent pas et les faits relatés concernent des périodes différentes (communauté de Loyola, personnes seules qui se déclarent abusées en conscience, harcelées spirituellement, psychologiquement ou sexuellement lors d’expériences relationnelles avec le père Rupnik, personnes ayant fait partie du Centre Aletti). Par conséquent, le degré de crédibilité de ce qui est rapporté ou observé semble être très élevé. » 🡵 En conséquence, de nouvelles sanctions frappent Rupnik : il doit « cesser toute « activité artistique publique », ce qui s’ajoute à l’interdiction, déjà en vigueur, de donner des conférences, de célébrer publiquement la messe ou de quitter la région de Rome sans l’autorisation de ses supérieurs » 🡵.
- Décembre 2022 : médiatisation de l’affaire Rupnik dans la presse, avec le témoignage de « Anne » (Gloria Branciani, sortie de l’anonymat en février 2024) dans le quotidien italien Domani : « Ce n’était pas difficile d’accepter de déboutonner quelques boutons du chemisier. Pour moi, qui étais naïve et inexpérimentée, cela signifiait simplement aider un ami. À cette occasion, il m’a embrassée légèrement sur la bouche, me disant qu’il embrassait ainsi l’autel où il célébrait l’Eucharistie. J’étais abasourdie. » « Ainsi, le sentiment d’être aimée comme la Sagesse jouant devant Dieu, décrit dans le Livre des Proverbes, s’est transformé en la demande de jeux de plus en plus érotiques dans son atelier à Rome, pendant qu’il peignait, après la célébration de l’Eucharistie ou la confession. » Elle assène alors : « Son obsession sexuelle n’était pas improvisée mais profondément liée à sa conception de l’art et à sa pensée théologique. » 🡵.
- Début 2023 : Témoignage de Ester (Mirjam Kovac, sortie de l’anonymat en février 2024) : elle témoigne d’abus psychologiques 🡵.
- Avril 2023 : Témoignage de Soeur Samuelle Cheron dans La Vie 🡵.
- Juin 2023 : Renvoi de Rupnik des Jésuites et l’incardination en Slovénie Rupnik est renvoyé de la Compagnie de Jésus « en raison de son refus obstiné d’observer le vœu d’obéissance », notamment ses voyages, en dépit des restrictions de déplacement qui lui étaient imposées 🡵. Il refusait notamment de quitter le Centre Aletti comme le lui ordonnent ses supérieurs 🡵.
- 2023 Accueilli et incardiné dans le diocèse de Koper en Slovénie 🡵: « tant que le révérend Rupnik n’a pas été reconnu coupable lors d’un procès public devant un tribunal, il jouit de tous les droits et devoirs des prêtres diocésains » 🡵. Il n’est donc pas restreint dans ses activités par des mesures conservatoires.
- Octobre 2023 : lancement d’une troisième enquête canonique Le pape François lève la prescription pour permettre la tenue d’un procès 🡵.
- Février 2024 : conférence de presse de deux anciennes religieuses Mercredi 21 février, s’est tenue à Rome, au siège de la Fédération nationale de la presse italienne (FNSI), une conférence de presse de deux anciennes religieuses consacrées de la Communauté de Loyola, Gloria Branciani et Mirjam Kovac, accompagnées de leur avocate Laura Sgrò 🡵. «Il disait que je ne grandirais pas spirituellement si je ne subvenais pas à ses besoins sexuels», a raconté lors d’une conférence de presse à Rome Gloria Branciani, membre de cette communauté jusqu’à son départ en 1994. Parmi ses méthodes, le père Rupnik invoquait la Trinité pour contraindre les religieuses à avoir des relations sexuelles à trois avec lui, a-t-elle rapporté en dénonçant une emprise «morale, spirituelle et psychologique» 🡵 ainsi que les visionnages forcés de films pornographiques, dans deux cinémas romains « où Rupnik avait ses habitudes » 🡵.
- Fin octobre 2024 : les victimes disent se sentir déçues et trahies face au manque de réponse et de transparence de l’Église 🡵.
Dicastère pour la Communication du Saint-Siège
Le Dicastère pour la Communication du Saint-Siège a continué à illustrer ses publications avec des œuvres de Rupnik. Comme par exemple pour la fête de saint Irénée de Lyon en juin 2023.
Au cours d’une conférence donnée aux États-Unis vendredi 21 juin [2024], le préfet du dicastère pour la communication a estimé que la destruction des œuvres du mosaïste accusé de multiples viols et d’emprise n’était pas une « réponse chrétienne ». « Retirer, effacer, détruire l’art n’a jamais été un bon choix », s’est justifié Paolo Ruffini, selon des propos rapportés par le magazine jésuite America. Le communicant italien a surtout affirmé vouloir attendre le jugement émis par le dicastère pour la doctrine de la foi, à l’issue d’un procès en cours, pour se prononcer. « Nous parlons d’affaires que nous ne connaissons pas. Qui suis-je pour juger les histoires de Rupnik ? », a-t-il fait valoir, avant d’ajouter : « Je pense qu’en tant que chrétiens, nous devons comprendre que la proximité avec les victimes est importante, mais je ne sais pas si le fait de retirer l’art de Rupnik est un moyen de nous rapprocher d’elles. » 🡵
Les mosaïques de Lourdes : Interview de Mgr Jean-Marc Micas, publiée le 2 juillet 2024
D’un côté « elles empêchent aujourd’hui des milliers de personnes de venir à Lourdes chercher ce pourquoi Lourdes est fait. » à 10:00… d’un autre, « J’ai décidé de ne pas les retirer dans l’immédiat, tant le sujet suscite de passions et de violence », sans que l’on sache de quelles violences il est question… des courriers peu aimables, peut-être ? Comme le dit Philippine de Saint-Pierre « Comment est-ce que vous pouvez annoncer une décision qui n’est pas en accord avec votre conviction profonde ? On a le sentiment que c’est privilégier une unité dont on ne sait pas très bien ce que c’est (…) au détriment de ce que vous disiez pour les victimes. » à 14:20
Y aurait-il quelques pressions romaines ? Selon Mgr Jean-Marc Micas, « tout le monde donne des avis. Jusqu’au plus haut niveau, mais ce sont des avis. ça n’a pas le statut d’ordre impérieux et je n’ai plus qu’à m’exécuter. C’est pas de cette nature. » à 17:47. Dans le contexte des récentes prises de position de Paolo Ruffini, préfet du dicastère pour la communication, et du Cardinal Sean O’Malley, président de la Commission pontificale pour la protection des mineurs, il semble plus que probable que Mgr Jean-Marc Micas ait été mis fortement sous pression.
Seule modeste avancée : les mosaïques ne seront plus éclairées la nuit, notamment pendant la procession aux flambeaux qui rassemble chaque soir au bord du Gave des milliers de pèlerins en quête de consolation et de réparation.
Rappel : les mosaïques de Lourdes peuvent être démontées sans être abîmées, car cette possibilité a été prévue dès leur installation.
Les Chevaliers de Colomb recouvrent des mosaïques de Rupnik (12 juillet 2024)
Les Chevaliers de Colomb, une association de bienfaisance catholique, ont annoncé leur décision de recouvrir les œuvres mosaïques de Marko Rupnik dans les deux chapelles du sanctuaire national Saint-Jean-Paul II à Washington, ainsi que dans la chapelle du siège des Chevaliers à New York 🡵.
« Notre première préoccupation doit être les victimes d’abus sexuels, qui ont déjà énormément souffert et qui risquent d’être encore plus blessées par l’exposition permanente des mosaïques au Sanctuaire », a déclaré Patrick Kelly, le chevalier suprême de l’organisation caritative catholique, précisant que cette décision était le fruit d’un « processus approfondi ». 🡵