La non critique aux Béatitudes et à l'Emmanuel

Communauté de l'Emmanuel

C'est comme « l'interdit de la critique » de la Communauté de l'Emmanuel qui amalgame complètement médisance et esprit critique. Il y a une dérive complète de la tradition monastique, celle là même qui nous a appris pourtant à « avoir voix au chapitre » 🡵.

Au début de la Communauté de l'Emmanuel, une seule règle a été écrite, celle de la « non-critique ». Dans le numéro 19 du magazine Il est vivant !, Pierre Goursat, fondateur de la Communauté de l'Emmanuel, met directement cette règle en lien avec l'exercice de la charité. Pour lui, elle est essentielle tant sur le plan personnel que communautaire.

Communauté de l'Emmanuel

Afin d'éviter tout malentendu, il est essentiel de rappeler ici que cette règle si précieuse de la « non critique » ne s'oppose en rien à l’« esprit critique ». Nous sommes évidemment appelés à avoir et à exercer un « esprit critique ». Car réfléchir, discerner, se faire une juste idée, est le propre de l'homme et indissociable de la recherche constante de la vérité. Nous ne possédons jamais la vérité, mais dans cette recherche persévérante, nous nous approchons peu à peu.

La correction fraternelle

La « non critique » est un acte de charité fraternelle et communautaire. Tout comme l'est également la correction fraternelle. Benoît XVI nous aidait à redécouvrir cette exigence que nous avons les uns vis-à- vis des autres. En effet, nous avons une responsabilité envers nos frères. Nous sommes appelés à ne pas nous montrer indifférents ou étrangers à leur destin, mais au contraire, à prendre soin les uns des autres. « Si nous cultivons ce regard de fraternité, la solidarité, la justice ainsi que la miséricorde et la compassion jailliront naturellement de notre cœur » (Message pour le carême 2012). Nous

avons donc une responsabilité spirituelle envers les autres, et eux, envers nous. Il n'est pas toujours aisé de l'accepter. La correction fraternelle est une action importante mais délicate, et demande beaucoup de charité et de prudence. Benoît XVI insiste sur le fait que le reproche chrétien ne peut pas être fait dans un esprit de condamnation et de récrimination, même si nous ne devons pas nous taire devant un acte objectivement mauvais. En commentant le passage de l'Évangile qui évoque la correction fraternelle (Mt 15, 18), le pape François donne quant à lui une méthode pour agir en vérité mais dans la charité (12 septembre 2014). « Si tu n'es pas capable d'exercer la correction fraternelle avec amour, avec charité, dans la vérité et avec humilité, tu risques d'offenser, de détruire le cœur de cette personne (…). On ne peut en effet réaliser une intervention chirurgicale sans anesthésie : c'est impossible, parce que sinon le patient meurt de douleur. Et la charité représente comme une anesthésie qui aide à recevoir le traitement et accepter la correction. »

Dans ce commentaire, le Pape nous invite aussi à prendre notre frère à part, à lui parler en vérité dans la charité et à observer l'état d'esprit qui accompagne notre démarche : suis-je dans l'excitation ou dans le plaisir d'aller lui « dire ses quatre vérités » ? « Quand cela vient du Seigneur, il y a toujours la croix, et l'amour qui nous porte, la douceur. Ne nous transformons pas en juge. Nous, chrétiens, avons cette fâcheuse tentation : nous extraire du jeu du péché et de la grâce comme si nous étions des anges… Eh bien non ! C'est ce que Paul nous dit : « Il ne faut pas qu'après avoir prêché aux autres, nous soyons ensuite disqualifiés. » Et si un chrétien, dans sa communauté, ne fait pas les choses – également la correction fraternelle – dans la charité, en vérité et avec humilité, il est disqualifié ! Il est tout sauf un chrétien mature. Prions donc afin que le Seigneur nous aide à exercer ce service fraternel, si beau mais si douloureux, d'aider nos frères et nos sœurs à devenir meilleurs, et qu'il nous aide à le faire toujours avec charité, en vérité, et avec humilité. »

Communauté de l'Emmanuel

La correction fraternelle ici présentée est un rappel à l'ordre de l'individu. La règle me semble conçue pour ne laisser aucune place à la critique du fonctionnement de la communauté ou de ses autorités 🡵.

Communauté des Béatitudes

Les frères et sœurs s'ouvriront avec simplicité, liberté et confiance de leurs éventuelles difficultés à accomplir ce qui leur aura été demandé, évitant cependant tout esprit de critique négative et de contestation, afin d'établir avec leurs responsables un vrai dialogue permettant de mieux discerner la volonté du Seigneur.

Statuts de 2002 de la communauté des Béatitudes, Chapitre sur l'obéissance, p. 12

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