Le parcours du combattant d'une victime d'un prêtre de l'Emmanuel

Cette semaine je vous emmène dans les coulisses pas très reluisantes de la @CteEmmanuel. Voici l’histoire d’une victime. Un condensé de ce qui ne va pas dans l’Église. Tout y est: le drame évitable, le mépris et l’indifférence après, la protection du prêtre et de l’institution.⬇️

Nous sommes dans les années 2000. Cette femme, appelons-la Marie, est mariée, plusieurs enfants. Communautaire de l’Emmanuel. Elle croise en 2007 le chemin du père M.

Très vite, celui-ci assied son emprise sur toute la famille. Il sympathise avec le père. Il baptise les enfants. Il viole la maman. De nombreuses fois.

Marie a réussi à sortir de l’emprise en rencontrant par hasard une autre victime. Le père M. avait ciblé exactement le même profil. Elle porte plainte en 2019, et l’autre victime. Le père M. est arrêté, mis en garde à vue où il reconnaît les viols sur les deux femmes.

C’est là que Marie apprend à ses dépens qu’en France, quand on est victime d’un violeur, il y a toutes les chances qu’on devienne victime du système judiciaire. Les plaintes sont classées sans suite, « faute d’éléments matériels ». Malgré les aveux.

Voici Marie doublement victime. Et très vite elle le devient triplement. Elle aurait pu faire appel de cette décision et aurait probablement eu gain de cause. Oui mais voilà : à l’officialité (le tribunal de l’Église) on lui a dit qu’il fallait que la procédure laïque soit close pour une plainte ecclésiastique. C’est faux. Elle l’ignore. Elle se concentre donc sur la procédure canonique, afin que son agresseur ne soit plus prêtre.

Commence donc un troisième enfer. Celui d’une victime perdue dans une communauté qui fera tout pour se protéger (de la victime, hein, pas du violeur). Il se trouve qu’un évêque actuel, issu de l’Emmanuel, porte une certaine responsabilité personnelle dans l’affaire. Voyez-vous, quand le père M était au séminaire, son comportement posait déjà question. À tel point que le conseil du séminaire avait recommandé par deux fois de ne pas l’ordonner. À l’unanimité. Pour l’ordination diaconale, puis presbytérale. Ces rapports sont dingues.

Extraits.

Mais à l’Emmanuel, on considère visiblement que les séminaires diocésains sont là pour entériner le choix de la Communauté. Une simple formalité, en somme. Qui sont ces pères de séminaire qui osent s’imaginer savoir mieux que l’Emmanuel qui est digne d’être prêtre de l’Emmanuel ? Le responsable des prêtres de @CteEmmanuel de l’époque fait donc le forcing pour que le père M soit ordonné. Il réécrit pépouze le rapport du séminaire qui ne lui convient pas. Et obtient gain de cause, l’évêque du lieu appelle M à la prêtrise.

Voici les documents.

Aujourd’hui, Mgr Jacques Benoit-Gonnin, évêque de @catho60, puisqu’il s’agit de lui, a de magnifiques paroles sur le scandale des violences sexuelles. Voici un extrait de sa « Lettre au Peuple de Dieu dans l’Oise ». Que ne s’est-il appliqué ses belles paroles à lui-même.

Marie porte donc plainte auprès de l’officialité interdiocésaine. Manque de bol, elle vit dans un diocèse dont l’évêque, lui aussi, est issu de la @CteEmmanuel. Je vous présente Mgr Yves Le Saux, évêque à l’époque de @Diocese72. Bouleversé par les VSS dans l’Église, lui aussi.

Il est embêté, Le Saux. Il sait bien que cette affaire met l’Emmanuel dans la sauce. Un prêtre de l’Emmanuel, ordonné grâce au forcing de l’Emmanuel, qui a merdé et pas qu’avec Marie (une autre victime de viols et une liste de femmes disons… Qui aurait mérité investigation).

Et il se trouve que celui qui a succédé à Benoît-Gonnin comme responsable des prêtres à @CteEmmanuel, c’est lui. Que celui qui a dû é̶t̶o̶u̶f̶f̶e̶r̶ ̶gérer les multiples alertes qui n’ont pas tardé à remonter dès l’ordination du père M, c’est lui.

Mieux encore. Le Saux est maintenant évêque. Non seulement celui de la victime, mais aussi… celui du père M. Et voilà que Marie veut un procès canonique. Autant dire qu’il est bien content d’avoir tout pouvoir sur ce procès, étant l’évêque du lieu. C’est donc parti pour balader Marie. Et alors il y met tout son cœur.

D’abord il s’assure d’être le seul maître à bord. L’autre victime est d’un autre diocèse ? Hop, il vire l’autre diocèse de la procédure. Il promet le procès, puis en douce pose une « sanction » (« précepte pénal »). Marie l’apprend… Par hasard.

Elle demande donc des comptes au procureur de son procès. Celui-ci tombe des nues. Et lui explique que du coup, elle peut se brosser pour que son violeur soit viré de l’Église.

Je vous passe mille péripéties visant à protéger le prêtre et à faire taire la victime. Je les ai, dûment documentées. Que Marie ne soit pas devenue folle est un miracle.

Pendant deux ans, elle envoie à Le Saux les preuves multiples que M viole à tire-larigot sa sanction. Faut dire qu’elle est rude sa sanction: trois ans dans un monastère à se faire discret. Bah non.

Et que je fais le kéké sur les réseaux, et que je contacte une victime, etc. Deux ans durant lesquels la prescription canonique continue de courir, hein. Finalement, le père M fait la transgression de trop, même pour Le Saux : le procès pénal canonique se tient, et malgré la prescription de nombreux viols, il est renvoyé de l’état clérical en mai 2023.

Mais l’histoire ne s’arrête pas là. En fait elle commence.

La sentence du procès pénal canonique reconnaît en effet la responsabilité de la @CteEmmanuel. Et la condamne à indemniser… le père M. Bah oui, choupinou. Il a plus de boulot. Les victimes, nada. Rien. Que dalle.

Comment vous dire que les victimes ont légèrement vrillé. L’une a claqué la porte de l’Église, considérant qu’il n’y a plus rien à en attendre et comment ne pas comprendre. Marie a décidé de rester et de continuer à se battre. (je vous ai dit à quel point j’admire cette femme ?)

Elle a donc cherché une instance de conciliation qui lui permette de négocier une indemnisation avec la @CteEmmanuel. L’Inirr, d’abord, puisque M était prêtre diocésain. Manque de bol, elle s’est fait violer adulte. Pas dans les critères.

Elle se tourne alors vers la CRR. La Commission Reconnaissance et Réparation lui explique alors que la @CteEmmanuel n’adhère pas à la CRR. Alors qu’elle le pourrait: nul besoin d’être membre de la #CORREF @VieReligieuse pour en être membre. Ni même pour y faire appel ponctuellement. Mais refus total de leur part.

@CteEmmanuel @VieReligieuse On lui conseille alors de faire appel au service Conseil et Conciliation/Emprise et Dérives (CCED) de @Eglisecatho.

On est en juillet 2023. Au CCED, on lui dit qu’on va « entreprendre les démarches nécessaires ». Et c’est reparti pour quémander un suivi correct.

@CteEmmanuel @VieReligieuse @Eglisecatho C’est vraiment un des trucs qui me fume. T’es secrétaire d’un truc qui s’occupe de gens bousillés par l’Église. Ça te flinguerait de répondre aux mails dans les deux jours max, avec précision, voire de décrocher ton téléphone ? Je vois ça sans cesse, et pas qu’avec cette cellule. @CteEmmanuel @VieReligieuse @Eglisecatho ll faudra attendre TROIS MOIS pour que Marie ait des nouvelles. Elle ne sait même pas si cette médiation qu’on lui propose sera payante ou pas. Juste que ce sera « un médiateur avec qui le CCED a l’habitude de bosser ». Qui payera, mystère. Mais ça c’est bassement matériel.

@CteEmmanuel @VieReligieuse @Eglisecatho Trois mois durant lesquels, évidement, pendant que la secrétaire du CCED pense avoir fait son job en envoyant deux mails type à Marie et en la recevant deux heures, bah Marie se coltine la vraie vie. Une famille épuisée par quatre années de démarches délirantes, un couple à bout.

@CteEmmanuel @VieReligieuse @Eglisecatho Et puis en octobre Marie reçoit un mail… Du président de la commission interne de la @CteEmmanuel. Qui décide donc que la médiation de @Eglisecatho il n’en a rien à cirer. Ça en dit long sur le pouvoir de la Conférence des Évêques de France sur l’Emmanuel 👏👏👏👏

@CteEmmanuel @VieReligieuse @Eglisecatho Hé oui, la @CteEmmanuel a sa propre commission interne. Sur laquelle il y aurait beaucoup à dire, et sur laquelle je dirai beaucoup à l’occasion. Disons que c’est une machine à laver le linge sale en famille. Hors de question pour Marie de faire appel à eux. @CteEmmanuel @VieReligieuse @Eglisecatho Au CCED on est très embêté. On demande donc à la victime de rentrer dans des petits jeux de pouvoir, d’en dire un peu mais pas trop, bref de faire le job à leur place. Ça tombe bien, elle avait que ça à foutre.

@CteEmmanuel @VieReligieuse @Eglisecatho S’ensuivent des échanges de mails hallucinants, où Marie avec une dignité dont tous ces gens feraient bien de s’inspirer continue de demander une médiation externe, pendant que @Eglisecatho et @CteEmmanuel se paient le luxe d’une confrontation sur son dos.

Et là, elle dit stop.

@CteEmmanuel @VieReligieuse @Eglisecatho C’est la goutte d’eau.

Entre la commission interne de la @CteEmmanuel qui lui demande ses « intentions » (bah organiser un tournoi de pétanque à Paray, pourquoi ?), le CCED qu’elle doit continuer de relancer, sa famille qui n’en peut plus, elle jette l’éponge.

Elle prend un avocat.

@CteEmmanuel @VieReligieuse @Eglisecatho Et là, panique à bord. La @CteEmmanuel lui répond immédiatement (tiens donc): « Nan mais on était OK en fait, c’est le CCED qui a rien compris ». Le CCED n’apprécie pas et balance à Marie toute sa correspondance avec l’Emmanuel. AMBIANCE

@CteEmmanuel @VieReligieuse @Eglisecatho Vous noterez le merveilleux « cela nous semble la meilleure chose pour tous ». Bah oui, continuons de laver notre linge sale en famille avec de la lessive qui fait des trous. Comme Marie persiste à tout envoyer péter, on tente un coup de pression. « Mais vous restez libre hein ».

@CteEmmanuel @VieReligieuse @Eglisecatho Marie persiste et envoie tout ce petit monde s’occuper d’autres victimes (les pauvres). Commencent les négociations avec l’avocat. Spoiler : la @CteEmmanuel se sent toujours au-dessus de toute responsabilité. À un point effarant.

@CteEmmanuel @VieReligieuse @Eglisecatho Mais bon, ils ont autre chose à faire que reconnaître qu’ils ont gravement merdé : ils ont des leçons d’Évangile à faire à la terre entière. Pas grave.

On sortira tous les dossiers s’il le faut, mais ils demanderont pardon. Et ils signeront un (gros) chèque. Merde à la fin.

@CteEmmanuel @VieReligieuse @Eglisecatho Quant à @Eglisecatho qui en est encore à se demander s’il faut vraiment créer une instance PROFESSIONNELLE de réparation pour les victimes adultes, comment vous dire. Si vous n’avez toujours pas pigé que c’est une urgence, Que c’est dans votre propre intérêt, Bah continuez, hein.

@CteEmmanuel @VieReligieuse @Eglisecatho Faudra pas venir chialer après que vous croule sous les procédures et que vous êtes sur la paille.

Des dossiers comme ça il y en a plein. Et vous le savez. ⏹️

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