Les origines de Maria Stella Matutina
1982 La fondation des sœurs contemplatives de Saint-Jean
La communauté d’origine des Stella Matutina – les sœurs contemplatives de Saint-Jean – a été fondée en 1982 par une ancienne carmélite qui fut sans doute l’une des personnes le plus proches de Marie-Dominique Philippe : Alix Parmentier (1933-2016). Dès les années 1950, « le père » aurait commencé à entretenir des relations sexuelles avec cette étudiante de vingt ans sa cadette, selon trois témoignages concordants publiés dans le rapport de Saint-Jean 🡵.
2008 Elaboration du rapport des assistantes de la congrégation
Conscient de la nécessité de recadrer le fonctionnement de cette congrégation, l’évêque de Lyon, le Cardinal Barbarin, nomme assistantes de la congrégation deux religieuses bénédictines expérimentées (l’une de Pradines, Mère Marie-Joseph, et l’autre de Vénières, Mère Congard) qui ont dans un premier temps contribué à constituer un rapport qui a été transmis à Rome au cardinal Rodé, responsable de la Congrégation pour la vie consacrée 🡵.
2009 La crise éclate au grand jour
Suite au rapport de 2008 et en accord avec le Vatican, Mgr Barbarin, en tant qu’ordinaire de la communauté, cherche à restructurer la communauté. Le 6 juin 2009, « En accord avec la Congrégation pour la Vie Consacrée, le Cardinal Philippe Barbarin (évêque dont dépend la communauté des sœurs contemplatives de Saint- Jean) demande à la prieure générale, Sœur Alix Parmentier, de démissionner de sa charge et nomme Sœur Johanna prieure générale pour 6 ans et lui demande de nommer un nouveau conseil [ce qu’elle fait par la suite avec sœur Marie-Reine et sœur Christine]. Cette décision fait suite à des constats de dysfonctionnement dans la gouvernance et de phénomènes d’emprise. » 🡵. Sœur Alix (fondatrice âgée de 75 ans, prieure générale depuis la fondation en 1982, donc pendant 26 ans) est donc brutalement démise de ses fonctions ; cette brutalité, sans consultation officielle des évêques où les sœurs sont implantées et des sœurs elles-mêmes lui sera copieusement reprochée. Pour ce qui est de sœur Johanna, elle avait été prieure en Russie. Cette dernière, en tant que nouvelle prieure générale, relève de ses fonctions sœur Marthe qui « était assistante générale de la fondatrice sœur Alix, ainsi que maîtresse des novices pour le noviciat principal situé à Saint-Jodard, mais aussi référente pour tous les autres noviciats de mission, en Afrique, aux Philippines, au Mexique, aux États-Unis… et pour toutes les jeunes sœurs accueillies ici et là. Bref, pour l’essentiel, c’était sœur Marthe qui tirait les ficelles de la congrégation. Elle était pour nous une mère, une supérieure, une confidente, une formatrice, une enseignante, un modèle, un lien vivant avec le Père » 🡵.
Le lendemain, le 7 juin 2009, trente religieuses signent un refus d’obéissance aux nouvelles directives émanant de l’autorité diocésaine 🡵.
19 au 26 août 2009 : un chapitre clandestin des sœurs dissidentes se réunit à Cenves, avec une dizaine de supérieures autour de l’ancien conseil, et avec quelques frères de passages acquis à la « cause ».
Août 2009 : suite à la nomination d’une nouvelle maîtresse des novices (Sœur Christine), une soixantaine de novices quittent St Jodard 🡵.
Novembre 2009 : en raison des désobéissances envers la nouvelle Prieure générale, la Congrégation pontificale pour la Vie religieuse et consacrée nomme Mgr Jean Bonfils, évêque émérite de Nice, comme Commissaire Pontifical (il a les pouvoirs de la prieure générale) ayant comme mission de réorganiser la vie et l’unité de la communauté. Rome demande à 4 sœurs anciennement responsables, dont sœur Alix, d’être dans des lieux séparés hors de la communauté avec interdiction de communiquer à l’extérieur (sans pour autant les démettre de leurs vœux). Sœur Marthe est envoyée en Israël chez les sœurs de Bethléem (à Bet Shemesh), sœur Alix est éloignée les novices en dehors du noviciat, au prieuré de Terre-Basse (Alpes de haute provence), sœur Agnès-Marie (ancienne assistante générale) et sœur Isabelle (la propre jumelle de sœur Marthe et ancienne supérieure d’un couvent de formation à Cenves) sont envoyées dans d’autres communautés 🡵🡵.
2010
Saltillo au Mexique Pour échapper à la nouvelle gouvernance des sœurs contemplatives, une centaine de jeunes religieuses qui souhaitaient conserver intact l’enseignement de Marie-Dominique et de sœur Alix partent pour Saltillo, au Mexique, où Mgr Raul Vera Lopez, accepte dans un premier temps de recevoir « les novices qui ont été écartées, et les sœurs qui n’ont plus de statuts dans [la] congrégation » (lettre du 27/12/2009). Par la suite, d’autres demandent l’exclaustration, qui est une simple dispense de vie commune.
Mgr Bonfils, qui a toujours refusé, en accord avec Rome une scission de la congrégation des sœurs contemplatives à la faveur de sœur Alix, apprend la nouvelle. Le Vatican intervient auprès de l’évêque de Saltillo pour que le projet capote. Par ailleurs, le cardinal Rodé, en charge de la Vie religieuse au Vatican, a envoyé une missive personnelle à chacune des religieuses susceptibles de partir pour les mettre en garde contre une telle décision. Rétropédalage. Dans une lettre datée du 21 janvier 2010, Mgr Vera Lopez indique aux sœur qu’il ne souhaitait pas « devancer un acte de séparation » et qu’ « avec Monseigneur Bonfils et le Cardinal Rodé (…) [il] continue à chercher le chemin à suivre pour mieux vous servir. »
L’échec de la réunion de Lourdes de novembre Mgr Bonfils réunit toutes les professes perpétuelles en assemblée afin de discuter puis de voter à une majorité d’au moins les 2/3 un texte définissant un fonctionnement futur de la communauté allant dans le sens souhaité par Rome. Or, la majorité des 2/3 se dégage, mais en faveur de la ligne soutenue par sœur Alix (absente, comme les trois autres sœurs écartées). Le chapitre électif envisagé pour l’élection d’une nouvelle prieure générale est donc mis aux oubliettes. On peut comprendre la colère de certaines sœurs qui ont compris que leur vote ne serai écouté que s’il allait dans le sens souhaité par Rome…
2011 Mgr Brincard remplace Mgr Bonfils
Au mois de février, Mgr Bonfils démissionne, devant l’impossibilité de réunir un chapitre électif qui aurait permis de nommer une nouvelle Prieure Générale apte à gouverner cette communauté selon les règles habituelles de l’Église. Au mois de mars, Mgr Braz de Aviz, successeur récent à Rome du Cardinal Rodé à la tête de la Congrégation pour les Instituts de Vie Consacrée, nomme Mgr Brincard, évêque du Puy, nouveau Commissaire Pontifical de la Congrégation des Sœurs Contemplatives de St Jean. Celui-ci annonce qu’il compte « gouverner la Congrégation des Sœurs Contemplatives dans le prolongement du travail effectué par son prédécesseur ». Sur la lancée de son prédécesseur (Mgr Bonfils), Mgr Brincard a poursuivi un travail de fond pour tenter de convaincre les religieuses de cette communauté du bien fondé de sa mission. Pour cela, Mgr Brincard et Mgr Bitz ont fait la tournée des prieurés de cette communauté, n’hésitant pas à aller au Mexique, aux Etats-Unis, en Afrique et bien sûr également dans les prieurés en France 🡵.
2012
Benoît XVI renforce l’autorité de Mgr Brincard auprès des sœurs contemplatives de St Jean en le faisant nommer le 25 Février 2012, par décret de son Secrétaire d’Etat, Mgr Bertone, comme son « Délégué Pontifical ». Selon l’explication de Mgr Brincard, « le délégué pontifical agit au nom du Saint-Père lui-même pour une période déterminée. En ce qui concerne ma mission, il ne m’a pas été donné de terme mais un but. Le délégué exerce donc les pouvoirs de la Prieure générale augmentés de pouvoirs spéciaux. L’autorité du délégué touche à tous les problèmes propres de l’institut religieux et peut toujours être exercée chaque fois que le Délégué le juge nécessaire, pour le bien de l’Institut lui-même, même en abrogeant les constitutions. » Les pouvoirs de Mgr Brincard sont donc immenses.
Le 8 mars 2012, la Congrégation pour les Religieux dirigée par le Cardinal Joao Braz de Aviz a été dessaisie du dossier des sœurs au profit de la Secrétairerie d’Etat dirigée par Le Cardinal Bertone.
En avril 2012, Mgr Brincard a demandé aux sœurs de répondre par écrit, par oui ou par non, à la question de savoir si elles acceptaient par avance toutes les décisions qu’il allait prendre." (voir lettre d’espérance et dialogue du 12 avril 2013). Bien entendu, la plupart des sœurs ont répondu par un texte, et non par un mot !
Une année de formation obligatoire Pour recadrer la communauté, Mgr Brincard demande un an de formation à St Jodard avant d’être éventuellement autorisé à prononcer des vœux simples ou perpétuels. Sur les 380 sœurs contemplatives, la communauté compte 120 professes perpétuelles. Ce sont donc potentiellement 260 sœurs (sœurs novices et professes simples) qui sont concernées. Mgr Brincard écrira par la suite : «certaines sœurs ont accepté de participer à cette formation. D’autres sœurs s’y sont opposées au nom d’une intégrité du charisme dont elles se croyaient dépositaires» 🡵.
Fondation des sœurs de Saint Jean et de Saint Dominique 70 sœurs partent dans le diocèse de Cordoue en Espagne où elles créent le 29 juin 2012 une association publique de fidèles nommée «l’institut des sœurs de Saint Jean et Saint Dominique» 🡵, en accord avec l’évêque local, Mgr Demetrio Fernandez. Cela leur est possible car ce sont des novices ou des sœurs qui n’avaient pas prononcé de vœux définitifs. Cette nouvelle communauté se répand ainsi aux quatre coins du monde.
Dans une lettre du 20 aout 2012, sœur Gabriel, élue Prieure générale (prieure fantoche, pour masquer le vrai gouvernement 🡵), indique que cette communauté « veut vivre pleinement de l’esprit de Saint Jean, du père Marie-Dominique Philippe et de sœur Alix ».
2013 Dissolution des sœurs de Saint Jean et de Saint Dominique
Le 10 janvier 2013, Benoît XVI dissout par rescrit l’association des sœurs de St Jean et de St Dominique : « Étant donné qu’elle a gravement porté atteinte à la discipline ecclésiastique, (la nouvelle association) est supprimée avec effet immédiat et sans possibilité qu’elle soit reconstituée sous une autre forme » 🡵.
En 2019, le pape François dira : « Nous avons aussi dissous des congrégations religieuses féminines très liées à cette corruption », a-t-il ajouté, rendant hommage à Benoît XVI qui « a eu le courage de dissoudre une congrégation féminine où sévissait cet esclavage des femmes, allant jusqu’à l’esclavage sexuel de la part des prêtres et du fondateur ». Le pape a précisé à la journaliste d’Associated press, qui lui posait la question, qu’il s’agissait d’anciennes sœurs contemplatives de la communauté Saint-Jean qui avaient par la suite reconstitué une congrégation en Espagne 🡵.
Mais dès avant le rescrit de dissolution, les sœurs ont trouvé un nouveau point de chute à Bergara, dans le Pays basque espagnol, sous la protection d’un autre évêque conservateur, Mgr José Ignacio Munilla 🡵.
2014 Fondation de Maria, Stella Matutina
Dans une lettre adressée le 1er juillet aux Sœurs contemplatives de Saint-Jean, leur délégué pontifical, Mgr Henri Brincard, évêque du Puy-en-Velay, leur résume « un ensemble de décisions importantes que le Saint-Père a prises » et qu’il lui a « fait connaître » par lettre.
- Nomination prochaine d’un commissaire pour poursuivre le travail d’accompagnement de la famille saint Jean ;
- Le pape demande à la congrégation des Sœurs contemplatives de Saint-Jean de tenir « dès que possible un chapitre général pour choisir son gouvernement propre », sous la présidence de Mgr Brincard, ou, au cas où il serait « dans l’impossibilité de le faire », du cardinal Philippe Barbarin, archevêque de Lyon ;
- Autorisation donnée aux « ex-sœurs qui ont canoniquement quitté la congrégation des Sœurs contemplatives de Saint-Jean et les laïques qui voudront s’unir » de constituer une association publique de fidèles, « en vue de devenir institut religieux ». Cependant, toute référence au père Marie-Do devra être évaluée par la congrégation pour les instituts de vie consacrée ;
- En revanche, « les personnes que le Saint-Père a déjà en son temps éloignées des charges de gouvernement » – parmi lesquelles la fondatrice et ancienne prieure générale Mère Alix, ainsi que Sœur Marthe, maîtresse des novices, et d’autres de ses assistantes – sont « complètement exclues de la vie religieuse ».
Le 25 juillet : signature des statuts de l’association publique de fidèles « Maria, Stella Matutina » par Mgr José Ignacio Munilla, Evêque de San Sebastian au monastère de la Trinité, à Bergara en Espagne. (Autorisation de Rome le 17 juin 2014).
Dès l’origine, les deux conditions de Mgr Brincard ne sont pas respectées 🡵
- Même si mère Alix et sœur Marthe ne doivent plus avoir de charge de gouvernement, leur influence sera centrale dans la nouvelle communauté 🡵
- La référene au père Marie-Dominique Philippe restera centrale
A la création, Maria, Stella Matutina compte 225 membres de 20 nationalités. répartis dans 17 couvents (2 à Mexico, au Brésil, aux Philippines, aux Pays-Bas, en Allemagne, France et Espagne…). La maison de formation est à Bergara où Marthe Hubac a recréé l’ancien noviciat de Saint-Jodard. Elle est la « sœur aînée » (équivalent de père spirituel) de la plupart des sœurs et l’enseignante quasi exclusive de la communauté. Une ancienne de Stella Matutina confie que « 75 % des cours écoutés par les sœurs sont aujourd’hui donnés par sœur Marthe » 🡵.